L'histoire de ce prélude de Bach est assez particulière. Si on l'écoute sans la connaître, on peut penser, à juste titre, qu'il ne s'agit que de l'instrumentation à la Walter Carlos d'un prélude du Clavier bien tempéré. En réalité, ce n'est pas du tout de cela qu'il s'agit. J'aurais pu jouer ce prélude et l'enregistrer dans le séquenceur, pour ensuite l'habiller de timbres, et ce n'est pas ce que j'ai fait. J'ai délibérément ignoré le clavier, et j'ai entré chaque note en "pas à pas", en valeurs numériques, abstraites, comme si je n'avais jamais touché un piano de ma vie. Il a fallu que je (re)crée de toute pièce tous les paramètres qui contribuent, quand on joue d'un instrument, à donner cette sensation de jeu si particulière. On n'imagine pas le nombre de paramètres qu'il faut intégrer pour, par exemple, faire une gamme ascendante qui ait l'air d'être jouée par un être humain. Les nombres révèlent que l'instrumentiste ne va jamais tout droit. Le plus intéressant est que tout est surprenant, dans ce domaine. On croit, en jouant, faire un ritardando, ou un crescendo, et on s'aperçoit, quand on manie des valeurs numériques, qu'il ne s'agit pas de cela, ou pas uniquement de cela, et les moyens mis en œuvre pour parvenir à rendre la sensation de l'interprétation sont souvent bien différents de ceux qu'on croyait utiliser devant son instrument. Cette expérience, je l'imagine en tout cas, s'approche de celle de la traduction.
J'aurais mis une demi-heure à l'enregistrer. J'ai mis une journée à le recomposer de cette manière.
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